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Éditorial du mois

Éditorial du mois d’août 2023

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N’attendons pas la caméra avant d’aimer

Pendant un long temps de ma vie, je me sentais «en préparation» de quelque chose. Adolescent, j’avais l’impression d’être constamment en train d’apprendre à vivre. Adulte, mais toujours aux études, je fourbissais mes armes intellectuelles en vue de ma future carrière. Au séminaire, je m’entraînais à devenir prêtre – ce que je ne devins pas finalement.

Un jour, j’ai pris conscience qu’à force d’accumuler de l’élan en vue d’un futur saut, j’avais perdu la faculté de bondir joyeusement dans la vie. Je passais à côté de l’intensité du moment présent. Je manquais des occasions d’aimer.

Il est tellement plus difficile d’avancer avec constance dans l’épaisseur des jours que de courir un sprint glorieux. Plusieurs d’entre nous seraient prêts à donner leur vie s’il s’agissait seulement par là d’un sacrifice héroïque, effectué en quelques instants, comme au cinéma. Mais chaque jour, aimer son prochain, continuer à espérer malgré l’injustice, la folie du monde, l’absence apparente de Dieu: voilà un pèlerinage qui exige infiniment plus de nous.

En disant cela, je ne veux rien enlever à ceux et celles qui, le temps venu, ont tout donné en un seul souffle. Car ces moments décisifs adviennent bel et bien, à différents degrés pour chacun et chacune d’entre nous. Je veux seulement souligner que la meilleure préparation à ces instants vertigineux est de persévérer dans notre marche sur les pas du Christ, au jour le jour. Car c’est sa grâce qui nous rendra capables des grandes choses. «Celui qui est digne de confiance dans la moindre chose est digne de confiance aussi dans une grande.» (Luc 16, 10)

C’est la liturgie qui m’a enseigné à cesser d’attendre je-ne-sais-quoi, et donc à m’ouvrir au moment présent. Je ne lis plus des livres pour me préparer à d’éventuels débats théologiques avec des païens imaginaires; je les lis parce qu’ils me parlent de la vie, de l’être humain, de l’univers. Et en tout cela, de Dieu.

C’est peut-être pourquoi je préfère le temps ordinaire à toutes les autres périodes de l’année liturgique. Lors de l’Avent et du Carême, j’ai toujours l’impression de revenir à mes anciennes habitudes d’arrêter de respirer dans l’attente de la grande fête. C’est la façon qu’a Dieu de m’éprouver au désert, pour mon bien!

Le temps ordinaire ne titille pas ainsi mes faiblesses spirituelles, il m’accompagne dans ma quête de faire résolument un pas devant l’autre, encore et encore. N’attendons pas la caméra avant d’aimer. N’attendons pas d’être meilleur avant de dire notre «oui». La vie éternelle, c’est pour aujourd’hui!

Jonathan Guilbault

Exergue

Le temps ordinaire m’accompagne dans ma quête de faire résolument un pas devant l’autre, encore et encore.